Né sous une éclipse annulaire de soleil, scolarisé aux pieds de la tour dans les dimensions de laquelle le comte de Cagliostro mena bonne part de ses expérimentations alchimiques, Gyula Noesis a grandi au sein d’un mouvement chrétien apocalyptique, membre zélé de celui-ci, souhaitant ardemment la destruction de la majeure partie de l’humanité et croyant pouvoir vivre éternellement sous une forme charnelle. Deux mois après s’en être affranchi pour avoir le droit de bander sans avoir à se marier, il donne un premier concert au sein du groupe de punk hardcore qu’il vient d’intégrer, au cours duquel, friand de contacts, il fait pisser de sang le nez d’un spectateur. Suite à un premier concert solo, en présence de Madame la Ministre de la culture, pendant lequel il descend de scène pour poser une main sur les organes génitaux de certains de ses spectateurs, et diverses autres performances, dont l’une dans une galerie d’art inondée par vingt litres de sang de porc, interrompue par la police, où il se taillade le flanc en sautant par deux fois nu et de tout son long sur des tessons de céramique, et d’autres encore avec le collectif d’artistes Bongoût, il est remarqué par Jean-Louis Costes, qui lui propose de prendre part à sa tournée successive, nommée Holy Virgin Cult. C’est ainsi qu’après un premier voyage en Amérique du Sud — qui le conduira à gravir un volcan de 6000 mètres d’altitude volontairement sans nourriture ni eau, échappant de peu à une mort par hypothermie —, il devient son complice scénique au cours de 50 spectacles en Europe (Londres, Paris, Berlin, Genève, Vienne (à Vienne, sous les regards circonspects de protagonistes du mouvement artistique des actionnistes viennois, qui les qualifieront narquois de “Hermann Nitsch für Kinder”)…) et 20 aux États-Unis (NYC, Chicago, Los Angeles, Nashville, Miami, Denver (ville dans laquelle, pour lui faire un pied de nez, il passa entre les jambes de Boyd Rice, venu assister au carnage)…), accueillis par des groupes et des musiciens tels que Frank “Rat Bastard” Falestra, Cock E.S.P., Wolf Eyes, Panicsville, Fckn’ Bstrds… Hébergés par Lisa Suckdog pendant la période des répétitions, accompagnés tout du long par DJ Dog Dick — qui met à leur disposition sa Chevrolet —, ils sont invités par les Murder Junkies à se produire lors de la soirée célébrant le dixième anniversaire de la mort de GG Allin, invitation que Costes décline en raison de ses craintes relatives aux  probables excès de Gyula en une semblable occasion et aux conséquences de ces actes. Excédé par son comportement scénique, Costes lui interdit de plus en plus de formes d’agression sur son public et ainsi, frustré, Gyula décide de quitter la tournée. Tout en s’abreuvant des écrits du neurobiologiste Henri Laborit, Gyula travaille alors comme fossoyeur, puis démolisseur, afin d’autofinancer une marche solitaire débutée sur la péninsule du Kamtchatka (Sibérie), ayant dû se finir à Ciudad de México en passant par le détroit de Béring, idéalement franchi à pied sur la banquise. Mais après avoir perdu 21 kg en 27 jours, il retourne en Europe dépité, non sans avoir d’abord, à son retour à Petropavlovsk, sous le coup de la déception subséquente à son échec, attenté à sa propre vie en se faisant grossir de 10 kg en 5 jours, ce qui aurait dû causer une hémorragie cérébrale logiquement consécutive à une période de jeun prolongée immédiatement suivie d’intempérances alimentaires. Une fois installé à Berlin, après quelques nouvelles apparitions sporadiques (comme lors de la première exposition du photographe Maxime Ballesteros, ou la fois où il dessina par terre, sur le carrelage blanc, une longue bite de sang en utilisant son nez heurté comme d’un pinceau — en guise de présent au musicien noise Fecalove, que cette nuit-là il épaulait — ; ou celle où il fut grassement rémunéré pour cogner le visage de l’artiste Nico Vascellari durant sa performance à la foire d’art contemporain Artissima de Turin) et l’obtention du rôle phare dans une pièce de théâtre contemporain conçue par la compagnie Kinkaleri l’amenant, au cours de chaque représentation, à se balafrer le visage autour des yeux en sautant la tête la première à travers un panneau de bois, Gyula effectue un voyage long de dix-huit mois au cours duquel il traverse à pied 153 km de désert sans rien manger, est retenu prisonnier par des indigènes warí, cannibales jusqu’aux années 1960 (libéré après avoir involontairement charmé leurs enfants), arrêté en chemin par des indigènes ashéninka (qui lui apprennent qu’en poursuivant sa route, il aurait été dévoré par les indigènes murunahua), et donne un concert à Rio de Janeiro, où il est introduit au culte umbanda par une amie médium. À son retour, il s’entraîne, à Florence, avec l’une des quatre équipes de calcio storico fiorentino, cherchant à se faire sélectionner pour le tournoi annuel de ce jeu de balle considéré comme le plus violent au monde, puis se produit au festival Brutal Assault aux côtés de Merlin Ettore. Engagé en tant que croque-mort (activité qui l’amène à manipuler des dizaines de cadavres), également maître de cérémonies funéraires, il entreprend d’autofinancer une traversée pédestre de la jungle du bassin amazonien, de l’océan Atlantique à l’océan Pacifique. Pour se préparer à ce périple, il se rend auprès des indigènes sateré-mawé dans le but de se soumettre à l’infinie douleur du rituel de la tucandeira, consistant à se faire piquer les mains par des dizaines de fourmis géantes, afin de mettre à l’épreuve sa détermination. L’année suivante, dans une sombre forêt magique située aux pieds d’une montagne sacrée, Gyula a le privilège d’assister aux nombreuses possessions parfois sanglantes des Vénézuéliens qui vouent un culte à l’entité vaudoue María Lionza. Pour retrouver son corps puissant après la pandémie du Covid, il part traverser à pied l'Arménie sur ses montagnes, de Hrazdan à Meghri, et perd la vue pendant 48 heures atteint de cécité des neiges. Durant son premier séjour en Inde, il fréquente assidûment un temple réputé pour ses exorcismes où il se fait caresser par une jeune fille possédée, et donc par un démon. Après quoi, il réside pendant trois mois à 200 mètres de Manikarnika Ghat, sur la rive gauche du Gange, au contact de la secte hindouiste cannibale des Aghoris, réussissant à goûter à de la chair humaine sans blesser personne.